Présentation des voeux 2014 à la presse

… »En 2013, Vénissieux a poursuivi plus que son développement, elle a poursuivi son essor, sa dynamique, et renforcé, à travers le prolongement du Tramway jusqu’à la Doua, sa position géographique et stratégique de porte d’entrée sud de l’agglomération lyonnaise… »

Retrouvez l’intervention de Michèle Picard à l’occasion de la présentation de ses voeux à la presse

2013 a été marquée par une nouvelle montée du radicalisme en France. Le climat actuel n’est pas sain, la parole raciste s’est libérée, des propos xénophobes inadmissibles se banalisent. C’est assez révélateur des tensions et des fractures entre le politique, les médias, les institutions, et le peuple, qui se sent exclu, abandonné, lésé. Il faut prendre très au sérieux ces dérives récurrentes, car elles s’ajoutent à une abstention record et à un taux de défiance, à l’égard des institutions et des partis politiques, rarement atteint. La crise n’explique pas tout. Les sorties de Nicolas Sarkozy, en tant que président de la République, ont rendu les frontières poreuses entre l’UMP et le Front National, entre la droite républicaine et l’extrême droite. On paye aujourd’hui le prix de ce glissement. Mais cela doit également interpeller la gauche, dans la mesure où ses valeurs (lutte contre le racisme, esprit de fraternité, de solidarité) ne cessent de perdre du terrain depuis 20 ans.

J’y vois aussi les stigmates d’une gauche qui ne sait plus parler aux classes populaires, montrant son incapacité à répondre à l’urgence sociale, et aux attentes d’une population meurtrie par la crise. Je le dis clairement : le stade du vote FN contestataire, du vote en forme de provocation, est dépassé, nous sommes assis au-dessus d’une bombe sociale et électorale, et le péril de l’extrême droite en France, et plus généralement en Europe, prend forme petit à petit. Les politiques libérales de Bruxelles, du tout concurrentiel hier (des hommes, des territoires) au tout à l’austérité aujourd’hui, deux revers d’une même médaille, créent la montée des nationalismes. Les gens ne se sentent pas protégés, l’économie libérale est une économie de l’exclusion, qui tue, qui transforme l’être humain en bien de consommation, le salarié en variable d’ajustement de la rente et du dividende. On ne le fait pas travailler, on l’utilise, on l’use, on le presse et on le jette.

Comment voulez-vous que les repères ne soient pas brouillés, que l’amertume ne monte pas, que le ressentiment ne gagne pas les classes populaires ?

Le désarroi est d’autant plus vif que les attentes et les espoirs liés à l’élection de François Hollande sont déçus. Déçus parce que les Français attendaient une rupture en matière de choix économiques et de pouvoir d’achat, et ils ont l’impression que rien ne change sur le fond, que les différences entre la gauche gouvernementale et la droite gouvernementale se situent désormais à la marge. Déçus parce que la France n’a pas été en mesure de s’opposer aux politiques d’austérité, décrétées par Berlin et Bruxelles, elle s’est résignée à appliquer la règle d’or budgétaire, aggravant un peu plus encore la perte de souveraineté nationale. Déçus parce que les salariés n’ont pas reçu de coup de pouce significatif, (au contraire même, puisque la nouvelle réforme des retraites pèse à nouveau sur eux), à l’inverse des entreprises et du crédit impôt compétitivité qui est leur est dédié, soit près de 20 milliards d’euros par an en rythme de croisière. Déçus parce que les inégalités entre les riches, de plus en plus riches, et les pauvres, de plus en plus pauvres, ne cessent de se creuser, que le chômage est au plus haut depuis fin 1997, et que la casse de l’outil industriel se poursuit. En un an, ce sont plus de 1 000 plans sociaux qui ont été annoncés, soit 53 000 emplois directs menacés.

Vénissieux et l’agglomération lyonnaise sont touchées au plus près : je citerais Kem One, SITL, Bosch. Là encore domine le sentiment d’impuissance, pour arrêter un libéralisme mortifère, à l’origine de l’hémorragie de nos savoir-faire, de nos emplois et de nos productions industrielles.

Enfin il y a, je le crois, un réel décalage entre une urgence et une attente sociales des Français et des réformes sociétales, qui ne répondent pas à la crise du moment. Pouvoir d’achat, logement, emploi en général et emploi des jeunes en particulier, accès aux soins, sécurisation des parcours professionnels, revalorisation salariale, ce sont à ces préoccupations auxquelles il faut répondre en priorité. Ce gouvernement n’a pas créé la crise actuelle, il en hérite, tout comme il hérite, nous le savons, de dix ans de casse des services publics par la droite. On a pu mesurer, à travers la dernière PISA, les effets néfastes que cela a provoqué sur le niveau de scolarité de nos enfants, la droite n’a pas de quoi en être fière ! Mais François Hollande emprunte-t-il la bonne voie, en cédant aux chantres de l’austérité, les Français semblent en douter très fortement.

En 2013, Vénissieux a poursuivi plus que son développement, elle a poursuivi son essor, sa dynamique, et renforcé, à travers le prolongement du Tramway jusqu’à la Doua, sa position géographique et stratégique de porte d’entrée sud de l’agglomération lyonnaise. Dynamique démographique déjà, avec une ville qui gagne des habitants année après année. Ils étaient 740 nouveaux habitants à rejoindre Vénissieux en 2012. Quel que soit l’angle que vous preniez, une ville qui se repeuple est en meilleure santé qu’une ville qui se dépeuple. Je le dis à ceux qui s’inquiètent et qui parlent d’une démographie galopante, d’un bétonnage intensif de Vénissieux. Non, ça n’est pas le cas, on peut estimer aujourd’hui la population Vénissiane à un peu plus de 62 000 habitants, alors qu’elle était de 75 000 au milieu des années 70. Il y a donc une marge réelle, mais le plus important est d’avoir su enrayer ce phénomène terrible, souvent rédhibitoire pour les territoires, de dépeuplement, d’habitants qui quittent par centaine leur ville, pour des raisons économiques, par sentiment d’insécurité, ou par absence d’activités commerciales, sportives ou culturelles, par manque de dynamisme. Cet épisode est derrière nous et c’est, je le dis et je le répète, une excellente nouvelle.

En termes de constructions, la ville ne pratique pas la surenchère, pas plus qu’elle ne court après le nouvel habitant. Au cours des 12 derniers mois, 599 logements neufs ont été livrés dans notre commune : 222 en locatifs sociaux, 191 en accession libre, et 186 dans le cadre de résidences sociales, résidences étudiantes, Adoma, etc. Besoin de surfaces plus grandes lorsque le premier enfant arrive, besoin d’accession sociale à la propriété, besoin de logements d’urgence pour les familles monoparentales, ou mieux adaptés pour le 3ème âge, voilà ce qui se cache derrière ces 599 logements neufs : une réponse à l’urgence des familles que la crise du logement rejette sur le bas-côté, et une diversité de parcours qui profite à tous les Vénissians.

La politique du logement n’est pas d’un seul tenant, elle est variée, elle poursuit différents objectifs, de façon à fédérer aussi bien les nouveaux habitants que les anciens, dans une ville qui leur ressemble, dans une ville qui rapproche à travers tous les services publics de proximité qu’elle déploie dans l’ensemble des quartiers.

Pour l’agglomération lyonnaise, il est clair et il est écrit, que les villes de première couronne sont appelées à terme à se densifier, notamment autour des axes structurants. Les habitants attendent plus de mobilité entre une périphérie reliée et connectée à la ville centre. Le but aujourd’hui est d’identifier précisément les quartiers à densifier, et ceux à moins densifier, un travail de dentelle, une rénovation urbaine plus ciblée et plus chirurgicale est désormais à l’œuvre, notamment avec le PLUH.

2013 aura été également l’occasion d’afficher la détermination de la Ville pour défendre son outil industriel et celui de l’Est Lyonnais (Veninov, Bosch, Kem One, SITL). Ce sont des entreprises et des activités viables, il faut que les pouvoirs publics, l’État, la préfecture, les collectivités bien sûr et les syndicats se battent ensemble contre ce massacre inacceptable, cynique et révoltant, d’hommes, de femmes, de salariés, d’emplois et de savoir-faire. Cette bataille pour l’emploi, c’est aussi une bataille pour l’aménagement du territoire, pour le dynamisme d’une ville, et pour les jeunes générations. Dans ce cadre-là, l’excellente nouvelle de l’arrivée des laboratoires Carso illustre l’attractivité retrouvée, et le potentiel de Vénissieux, en terme de positionnement géographique et de dessertes routières, mais aussi d’interconnections des transports publics. Elle concrétise un travail de longue haleine, d’incitation et d’accompagnement, pour favoriser l’implantation des entreprises, ici à l’éco-parc du Couloud.

Cette arrivée peut impulser la création et la mise en place de filières de formation innovantes, entre le prochain Lycée Jacques Brel et les entreprises nouvellement installées sur le territoire vénissian. La future préfabrique Opéra s’inscrit elle aussi comme un point de convergence entre la jeunesse et les métiers de la création et de la culture. Le nouveau groupe scolaire Joliot-Curie, plus gros investissement de la ville au cours de ce mandat, et la pose de la première pierre du futur CNI, auront été des moments forts de ces douze derniers mois : pour la jeunesse, pour l’accès aux connaissances, pour la vie associative et la vie des clubs, pour le vivre ensemble. Enfin en matière de sécurité, l’année 2013 a montré à la fois des résultats encourageants, mais aussi une fragilité de la situation que l’actualité est venue nous rappeler. Le travail de terrain, accompli par l’ensemble des partenaires, la coopération entre la police nationale et la police municipale, les rencontres avec les bailleurs, les transports publics, la réorganisation de la DUPS (amplification des horaires de la police municipale, le TOP municipalisé avec de nouvelles missions), l’ensemble de ces dispositifs fait avancer Vénissieux dans le bon sens.

Je suis très vigilante sur ce point, c’est un travail de longue haleine qui est mené, de prévention et de fermeté, un travail de proximité qui ne prête ni au triomphalisme, ni à l’instrumentalisation démagogique. Il faut agir au quotidien, sans relâche, mais avec une détermination qui ne se dément pas, ici à Vénissieux. Vous le savez, les années qui s’annoncent seront placées sous le signe de l’austérité pour les collectivités territoriales, et plus particulièrement pour les communes. 1,5 milliards d’économies en 2014, à nouveau 1,5 milliards en 2015, ces coupes drastiques ne seront pas sans conséquences pour les politiques de proximité sociale, culturelle, associative, pour les services publics, mais aussi pour les capacités d’investissement des communes.

C’est un sujet d’inquiétude majeur, dont les Français sont conscients. 64% d’entre eux estiment que les 15 milliards d’euros d’économies sur les dépenses de l’État en 2014, risquent de détériorer les services publics et freiner la reprise économique. Je crois au contraire que c’est par les territoires, par des politiques ciblées de proximité, auprès des TPE-PME, des jeunes diplômés, par la formation, l’éducation, par la transmission des savoir-faire, que l’on sortira de l’impasse actuelle. Tout le monde parle d’austérité, mais personne n’évoque la sortie de crise. Je le crois, les communes ont un rôle majeur à jouer pour régénérer le pacte républicain à travers les outils de la démocratie locale, et pour apporter, à travers leur puissance d’investissement, une forte contribution à la croissance. Au lieu d’éloigner les citoyens et les habitants des centres de pouvoir et de décisions, renforçons plutôt les liens de proximité car ce sont eux qui enrichissent l’exercice démocratique.

Pour conclure cette conférence, je tiens à adresser mes condoléances à la famille, aux proches et aux collègues de Jean Jacquier, correspondant du Progrès à Vénissieux depuis de longues années, qui vient de nous quitter. Les journalistes de terrain sont un élément de l’identité vénissiane car vous écrivez en temps réel l’histoire de la ville, de ses habitants, de ses quartiers. Perdre un témoin de cette mémoire collective et en mouvement est un moment douloureux.

Je suis très attachée à la liberté de la presse, au débat, à la contradiction, à une presse et des médias qui font vivre et renforcent la démocratie. Votre métier est exigeant, dur, passionnant, dangereux aussi, comme la mort des deux journalistes de RFI au Mali nous l’a tristement rappelé. Économiquement, il est aussi le reflet de notre société actuelle, avec des plans sociaux qui s’accumulent en presse écrite, et des conditions de travail qui se détériorent. Que des quotidiens nationaux ou régionaux éprouvent autant de difficultés, que des enseignes culturelles disparaissent, que des librairies tirent le rideau les unes après les autres, ce sont des signes qui ne trompent pas, mais ce sont des signes qui livrent un état des lieux très inquiétant de nos démocraties en 2014, et de leur fonctionnement. Redonner du sens, du temps et des perspectives au débat public, c’est ce dont a le plus besoin le pacte républicain.

Je vous souhaite à tous et à toutes une excellente année, qui à n’en pas douter sera animée, et me tiens à votre disposition pour d’éventuelles questions.

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