Rassemblement Slow Food France

Retrouvez l’intervention de Michèle PICARD, à l’occasion du rassemblement annuel Slow Food France, le samedi 30 septembre dernier

Lundi 1er octobre 2012

Retrouvez l’intervention de Michèle PICARD, à  l’occasion du rassemblement annuel Slow Food France, le samedi 30 septembre dernier

 

C’est avec plaisir que je vous accueille aujourd’hui, sur Vénissieux. Je suis très attachée à l’éducation nutritionnelle, qui doit permettre aux adultes que nous sommes, de mieux s’alimenter et de faire découvrir à nos enfants, la diversité et le plaisir de bien s’alimenter. L’alimentation joue un rôle prépondérant sur notre santé, d’où l’importance de manger sainement. Si manger est un besoin vital, c’est aussi l’un des plus simples plaisirs de la vie, et surtout un art de vivre.

Que l’on parle de nouvelles habitudes alimentaires, de l’augmentation permanente des coûts des aliments, ou de l’industrialisation de la filière agroalimentaire, ce sont autant de facteurs qui ont modifié en substance le contenu de nos assiettes en 40 ans.

Dans un contexte de pauvreté endémique, pour les familles, se débattre au quotidien pour garder un semblant d’équilibre budgétaire, ne va pas forcément de paire avec une alimentation saine et équilibrée. Manger mal n’est pas toujours un choix, c’est aussi une contrainte de survie. Nous en connaissons les conséquences directes sur la santé publique, telles que l’obésité, les maladies cardiovasculaires, le diabète et le cholestérol…Sans parler des dérives productivistes de la filière agroalimentaire.

Tout récemment, une étude de toxicologie à long terme, a montré les effets dévastateurs des OGM sur des rats ayant consommé du maïs Monsanto. Ce géant américain de l’agroalimentaire, roi du lobbying, dont le nom est associé au PCB, compte un nombre de procès incalculables à son encontre. Chaque condamnation de cette firme ne constitue qu’une péripétie judiciaire de plus, dans un casier déjà très chargé.

Produire plus, vite, au plus bas coût, créer des variétés à culture rapide, moyennant engrais et pesticides, engendrer des races d’animaux à gros rendements, nourris à coup de granulés hautement énergétiques, altérer les recettes originales, en substituant les produits naturels par des produits chimiques, les industriels n’hésitent pas à jouer aux apprentis sorciers, privilégiant la rentabilité à la qualité des aliments et au bien-être des consommateurs.

Nous nous retrouvons aujourd’hui dans un environnement, où additifs, édulcorants, arômes artificiels, exhausteurs de goût, conservateurs, huile de palme, gélifiants, sont omniprésents dans notre nourriture, et leurs effets néfastes sur l’organisme sont encore trop peu connus.

Slow-Food, pour résister à l’installation d’un fast-food sur un site historique de Rome, voici le point de départ de votre mouvement, emporté par le chroniqueur gastronomique Carlo Petrini, et ses collègues de la société gastronomique italienne Arcigola. Vous vous êtes posés en rebelles, pour aider les consommateurs égarés à devenir des gastronomes avertis.

Aujourd’hui, votre action s’est étendue à bon nombre de pays : éducation au goût, découverte des saveurs locales oubliées, ou en danger de disparition, réappropriation en matière d’alimentation et de savoir-faire ancestraux.

Les Convivium, que vous avez créés, déploient leurs activités sous l’angle du vivre ensemble, et sous la forme de repas, dégustations, visites de fermes ou d’artisans de l’alimentation, conférences, ateliers de formation du goût… Cela passe aussi par la solidarité envers les plus démunis de la planète, et des projets que vous soutenez financièrement, tels ceux que vous avez menés au Nicaragua, au Brésil, en Bosnie ou en Italie, et ceci, toujours en respectant votre Credo : la promotion d’une alimentation locale, saine et équilibrée.

Votre tâche est, à l’évidence, un immense travail de terrain et de reconquête. C’est ce même travail, à une autre échelle, que nous avons engagé depuis 1945, avec la création de l’œuvre des restaurants d’enfants. Nous entendons poursuivre notre politique volontariste dans ce sens. Notre service public de restauration, devenu depuis 2000, la Régie de restauration scolaire et sociale de Vénissieux, réalise et livre 3 500 repas en moyenne par jour, principalement les scolaires. Il a d’ailleurs obtenu le certificat ISO 9001 version 2000, fruit d’une démarche participative de tous nos agents. Soucieux de la qualité, nous n’avons de cesse d’améliorer les techniques de fabrication, et la traçabilité des produits.

Nous nous approvisionnons, à hauteur de 20 % de produits biologiques, auprès de l’agriculture de proximité. Nous poursuivons un objectif, à la fois social et sanitaire, avec le concours d’une diététicienne, qui veille à offrir aux enfants un rééquilibrage nutritionnel, et un apprentissage au goût. Offrir une alimentation saine et équilibrée, est un enjeu majeur pour Vénissieux, d’autant que pour beaucoup d’enfants, il s’agit de leur seul repas complet et diversifié de la journée.

Les tarifs réduits instauré par la ville permettent un accès social à tous les enfants de la ville. Près de 1 900 enfants mangeant à la cantine, bénéficient de réductions de tarifs, soit près d’un enfant sur trois (en augmentation de 20 % sur ces deux dernières années). Au travers d’actions, comme l’opération « légumes du mois », mais aussi des repas thématiques et d’événementiels, comme la « Fraîch’Attitude », nous facilitons les découvertes et les sensations inexplorées de l’alimentation, mais aussi l’initiation à des cultures, d’un terroir inconnu ou de pays lointains.

A l’occasion de la semaine du goût, notre ville organise chaque année un temps fort, qui joue un rôle de stimulateur et d’ouverture vers de nouvelles saveurs. Les élèves des écoles vénissianes vivent cela comme un véritable événement, et viennent volontiers développer leurs papilles gustatives. Nous tenons absolument à les éduquer au goût et à la diversité alimentaire.

J’aimerais aussi parler du rôle précieux de l’Atelier Santé Ville, qui agit en lien avec les infirmières scolaires municipales, et les médecins scolaires de l’Education nationale. Pour lutter contre le surpoids ou l’obésité, pour sensibiliser les familles à l’équilibre nutritionnel, l’atelier a déployé un éventail d’actions à l’égard de l’enfance, des adolescents, des parents, et de l’accès aux soins. Une mission sanitaire indispensable.

Il est temps que nous nous préoccupions un peu plus de ce que nous mettons dans nos assiettes, connaître la composition de ce que nous mangeons est indispensable. Nous devons œuvrer pour une société sans malbouffe, sans conservateurs, sans additifs, sans exhausteurs de goût. Notre alimentation aurait sans conteste, une meilleure qualité nutritionnelle et des saveurs bien plus naturelles.

L’alimentation est un enjeu sanitaire de tout premier plan, face à une crise qui frappe en premier lieu les familles populaires, et leur impose une modification de leurs habitudes nutritionnelles. Nous sommes tous concernés et nous devons veiller à l’alimentation de nos jeunes, en particulier les éduquer au goût, car les habitudes prises très tôt, sont souvent les meilleures. Nous devons également faire évoluer la publicité, pour modifier les comportements des consommateurs. La législation française en matière de sécurité alimentaire doit, quant à elle, intégrer les notions de plaisir et de santé, mais aussi protéger les consommateurs du diktat industriel.

Je vous remercie de l’action concrète que vous menez, en faveur de la promotion des pratiques agricoles et de consommation respectueuses de la nature et des hommes.

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