Festival Essenti’Elles 2023

Oui, l’égalité femmes/hommes est un combat constant, en nous et devant nous.

10 ans d’existence et de présence, 10 ans de sensibilisation en s’appuyant sur les arts, la création, le patrimoine, afin de promouvoir l’égalité et le respect des droits des femmes. Nous fêtons un bel anniversaire, celui de notre Festival Essenti’elles, créé en 2013, et nous pouvons être fiers qu’il soit devenu un événement marquant à l’échelle de notre Métropole.

Le contexte national et international nous le rend très utile tant la conquête des droits des femmes et la défense des acquis restent d’actualité. Prenons l’exemple du Sénat, qui a adopté début février l’inscription dans la Constitution de la « liberté de la femme de recourir à l’avortement ». Un pas en avant certes, mais ce n’est pas là qu’il faut regarder. Les sénateurs ont substitué la notion de liberté à celle du droit, soutenue par les forces de gauche. Sacré recul par rapport à l’ambition du texte. Enfin, regardons de plus près le vote. 166 voix pour, 152 contre ! Courte majorité. Aujourd’hui en 2023, 152 sénateurs ont donc voté contre l’inscription du droit à l’avortement dans la constitution ! Une piqure de rappel très parlante !

Prenons l’exemple de la réforme des retraites d’Emmanuel Macron. Qui seront les grands perdants si l’âge légal du départ à la retraite passe à 64 ans ? Les femmes, une nouvelle fois. Les inégalités de salaire et les interruptions de carrière vont les pénaliser de plein fouet en pesant sur le montant de leurs pensions. L’écart est déjà abyssal entre les hommes et les femmes, un écart de 40% en défaveur des femmes. La différence se réduit à 28% avec les pensions de réversion.

Aujourd’hui 20% des femmes, contre 10% des hommes, attendent leur 67 ans et l’âge d’annulation de la décote pour partir à la retraite. 22,1% des femmes retraitées et divorcées vivaient sous le seuil de pauvreté en 2019 contre 13,4% des hommes. Si la réforme imposée par Emmanuel Macron était appliquée, il y aurait toujours 25% des retraités avec une pension inférieure à 1200 euros, environ 40% de femmes et 15% d’hommes.

Les injustices, elles sont nombreuses et on les connaît. Le salaire annuel net moyen des femmes est de 25 111€, soit 16,4% de moins que les hommes. Interrompre sa carrière pour faire un enfant, l’éduquer, se paye au prix fort, surtout quand on sait que la gestion du foyer est majoritairement assurée par les femmes. Pour les temps partiels, la même injustice sévit. 28% des femmes y ont recours contre 7,6% des hommes. Mais ces temps partiels, dans la majorité des cas,  sont subis et non pas choisis, pour des raisons économiques, pour des problèmes de garde d’enfants, etc.

Le recul de l’âge légal va accroître la précarité des femmes en favorisant une double peine qui serait à la fois le « ni en emploi ni en retraite ».

Nos aînés le savaient, notre génération le sait et les jeunes femmes d’aujourd’hui peuvent le deviner : le combat pour les droits des femmes est permanent. Se croire arrivé, c’est laisser la porte ouverte aux forces rétrogrades de la société patriarcale. Ces forces s’engouffreront immédiatement dans les brèches.

Regardez la situation aux Etats-Unis. La Cour suprême a révoqué l’arrêt Roe versus Wade en juin 2022. Depuis, 17 états ont interdit ou sont en passe d’interdire l’IVG. Il était anticipé que 26 États l’interdisent complètement, soit la moitié des États-Unis. Cela concerne des millions de femmes.

Oui, l’égalité femmes/hommes est un combat constant, en nous et devant nous.

Ce n’est pas le combat des femmes contre les hommes, mais celui des hommes et des femmes pour une égalité de droit, de place dans la société civile comme dans le monde professionnel. Un combat commun contre ce fléau, cette barbarie que sont les violences faites aux femmes.

En 2022, en France, 111 féminicides ont été commis. 95 femmes ont été tuées chez elles, 15 hors domicile, 1 non connue. 58 d’entre elles étaient en contexte de séparation et/ou de violences connues. 70 étaient des mères de famille (dont 6 tuées avec leurs enfants) + 2 enceintes (5 mois et 8 mois). 144 orphelins dont 38 témoins (34 présences, 4 découvertes). Ces chiffres sont effrayants, et ils le sont d’autant plus que les progrès en la matière sont très faibles ces dix dernières années. Depuis l’emploi tardif des statistiques en France, à partir de 2006 seulement, plus de 2200 femmes ont été tuées. Pourquoi notre société n’arrive-t-elle pas à endiguer cette violence ?

J’invite à la lecture de deux ouvrages, deux enquêtes, l’une menée à Lyon, dans des groupes de paroles d’hommes suivis pour ne pas récidiver et dans les tribunaux en France. Il s’agit de « Nos pères, nos frères, nos amis : dans la tête des hommes violents » de Mathieu Palain et « Nos absentes, à l’origine des féminicides » de Laurène Daycard. Enfin, toujours au sujet des violences conjugales, pourquoi ne pas adopter en France les mesures coercitives prises en Espagne, dont les résultats positifs sont manifestes.

Notre Ville est plus particulièrement engagée dans la lutte contre les violences faites aux femmes, et dans le soutien aux victimes de ces violences. Elle a adopté, lors du Conseil municipal du 15 décembre 2022, une convention quadripartite pour la mise à disposition de logements d’urgence, convention dont la ratification interviendra le 24 mars prochain. Le manque criant d’hébergements d’urgence sur le territoire national doit interpeller l’Etat, dont les réponses à ce jour ne sont pas à la hauteur du défi à relever. Ajoutons à ce dispositif, la convention passée avec VIFFIL, qui nous permet d’accompagner 25 femmes vénissianes isolées, avec ou sans enfants, victimes de violences.

Je rappelle que notre ville prend en charge le financement d’une intervenante sociale au commissariat, un premier accueil essentiel pour orienter et rassurer la victime. Un psychologue a également pris ses fonctions au commissariat afin de renforcer encore les démarches d’accompagnement.

La journée nationale de lutte contre les violences le 25 novembre est désormais l’occasion d’un temps fort sur notre territoire.

En 2022, la Ville a accompagné plusieurs initiatives citoyennes telles que la représentation de la pièce Respirs sur les violences conjugales ou encore la pièce « Sororité, l’altra storia », série théâtrale relative aux femmes autrices révolutionnaires avant-gardistes.

Il nous reste donc beaucoup de travail et dans tous les domaines : professionnel, social, sphères familiale et intime. En somme, dix ans après sa création en 2013, notre Festival Essenti’elles garde toute son utilité.

Je voudrais valoriser dans un premier temps les synergies entre tous nos équipements et tous nos services, la mobilisation de nos agents, résultat d’un travail collectif remarquable. Il n’y aurait pas de festival sans vous tous, sans la mobilisation des acteurs de terrain et des associations vénissianes et sans notre volonté politique d’agir pour les droits des femmes.

Le festival 2023 a pour thème les « Femmes engagées et actrices de l’Histoire », un thème qui  mettra à l’honneur les femmes qui créent, qui marquent l’histoire, qui pensent notre société. Pour quelles raisons seraient-elles reléguées à l’arrière-plan ? Pourquoi n’occupent-elles pas le devant de la scène ou de l’espace médiatique au même titre que les hommes ?

Des tables rondes, des débats, des spectacles, de la musique et du cinéma, la présentation du travail mené dans les EPJ, viendront animer cette 11ème édition de notre festival. Il y a le temps de la sensibilisation, de l’éducation, de la pédagogie, et le temps de l’action. L’un ne va pas sans l’autre à Vénissieux.

La Ville anime le Collectif Femmes de Vénissieux  qui, depuis le 8 février, diffuse une newsletter bimestrielle,  La 8 , sur le droit des femmes et l’égalité femmes-hommes. Le 25 janvier 2023, une rencontre des membres du Collectif Femmes a eu lieu avec l’association IMPACT.

A travers des stages et formations, l’association ne propose pas seulement de s’initier aux techniques d’autodéfense, mais d’adopter des comportements et toutes sortes d’attitudes pour prévenir les violences sexistes ou liées au genre. À noter que les personnels féminins de la Ville de Vénissieux ont, elles aussi, eu l’opportunité de participer à des Ateliers d’autodéfense féministe animés par l’association IMPACT, formation qui sera plus largement proposée en 2023.

La santé des femmes est également un axe qui a pu être travaillé lors du Forum Santé 2022 avec la participation de nombreux partenaires.

La Ville est associée à la collecte métropolitaine de protections hygiéniques féminines qui se déroulera du 8 mars au 28 mai 2022, en partenariat avec l’association Règles élémentaires.

Plus largement, les enjeux d’égalité croisent nos politiques publiques à l’œuvre : aménager l’espace public, par le suivi du projet pilote d’aménagement sensible au genre de l’esplanade Jean Cagne (ZAC Armstrong) ; sensibiliser les enfants et les jeunes sur les thématiques d’égalité, avec, par exemple, le projet mené par Filactions et Vilain.e.s de sensibilisation au sexisme dans le couple.

Faciliter l’insertion et l’accès à l’emploi des femmes, dans le cadre de la Cité de l’emploi qui cible les familles monoparentales en QPV, en majorité des femmes ; favoriser l’égalité dans le sport, tel le projet fémini-sport mené par l’EPJ Léo Lagrange.

Cet élan vénissian, je le porte bien sûr à l’échelle de la Métropole en tant que Vice-Présidente en charge de la Lutte contre les discriminations et de l’égalité femmes/hommes. Nous avons mené des campagnes fortes auprès du grand public, comme notre campagne Changer les Règles dont j’ai déjà parlé. Concernant le plan d’action égalité femme-homme, j’ai renforcé et lancé un nouveau plan de 84 actions pour la période 2021‑2023, élaboré et conçu pour agir sur l’égalité professionnelle en interne. Il intègre aussi l’égalité femme-homme dans l’ensemble des politiques publiques menées par la Métropole de Lyon.

Nous le savons tous ici, notre combat pour les droits des femmes n’a pas de fin, c’est un horizon à atteindre. Chose rare, une femme, Annie Ernaux, a reçu le prix Nobel de Littérature cette année, et c’est à elle que je laisse le mot de la fin : « Les rêves n’existent pas au passé. »

A nous donc de rêver et bâtir l’avenir des femmes. Bon festival à tous.

Je vous remercie.

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