Hier en fin d’après-midi, j’ai présenté mes vœux à la Sacoviv. Il y a beaucoup à faire, mais il y a aussi une fierté à se battre au quotidien pour le logement social, à se battre pour les politiques de proximité, ce sont des combats de terrain, âpres par les temps qui courent, des combats pour la dignité des hommes, femmes et familles de Vénissieux.
Cela peut paraître anecdotique pour certains, mais ça ne l’est pas sur le fond. Lors de l’annonce du nouveau gouvernement Attal, absence totale et remarquée de tout ministère du logement ! Est-ce une mauvaise plaisanterie ou un acte manqué ? Un peu des deux, je suppose.
Un secrétaire d’état ou un ministre délégué devrait être nommé bien sûr, mais il y a là quelque chose de choquant. « Il eut été vraiment pertinent je pense, au moment où le logement pose problème profondément dans notre pays, de repositionner cette question, comme celle de l’emploi, celle de la santé, celle de l’éducation, et ainsi de revenir aux vraies préoccupations de nos concitoyens » a déclaré Christophe Robert, délégué général adjoint de la Fondation Abbé-Pierre, avant d’ajouter : « Là, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond ».
Oui, quelque chose ne tourne pas rond car le logement en France connaît une crise sans précédent, aiguë et très préoccupante. Tous les indicateurs sont dans le rouge et nous sommes au bord du vide. C’est d’autant plus inadmissible que cette situation catastrophique ne s’est pas créée du jour au lendemain. On l’a vue venir et on l’a vue venir de très loin ! Les élus locaux ne cessent d’alerter les pouvoirs publics depuis plus de 15 ans.
Construire plus de logements sociaux et augmenter de façon drastique les places en hébergement d’urgence, voilà ce que nous avons toujours demandé à l’Etat, avec le concours bien sûr des collectivités locales. Vénissieux, irréprochable en la matière, ne s’est jamais échappée de ses responsabilités, quand 2/3 des villes concernées par la production de logements dans le cadre de la loi SRU n’ont pas atteint leurs objectifs entre 2020 et 2022.
Si la crise sanitaire a eu un réel impact sur le ralentissement de la construction de logements neufs, de même que l’augmentation des prix des matériaux du bâti, d’autres explications ont des raisons politiques.
Lors du premier mandat d’Emmanuel Macron, outre la baisse des APL, la mise en place d’un dispositif qui ponctionne les organismes HLM sur leurs fonds propres a eu des effets délétères. Cette ponction s’élève à 1,3 milliard d’euros par an ! On en mesure aujourd’hui les conséquences néfastes : en 2018, 125 000 logements étaient principalement financés par l’Etat et les collectivités locales, on devrait atteindre péniblement 85 000 logements sociaux en 2023.
On a donc construit l’année dernière deux fois moins de HLM que nécessaire pour résorber la crise du logement en France ! Cette insuffisance criante s’ajoute à deux années inabouties. L’objectif précédent, fixé en 2021 par la ministre d’alors, Emmanuelle Wargon, visait 250.000 nouveaux logements en deux ans. Il avait été largement raté, avec moins de 100.000 autorisations par an en 2021 et 2022. On estime aujourd’hui qu’il faudrait créer 200 000 nouveaux logements sociaux par an pour répondre aux grandes tendances démographiques et résorber le mal-logement. On en est très loin, on a même pris la direction opposée.
A ces objectifs politiques qui ne sont pas atteints, s’ajoute une double crise de la demande. Fin 2022, 2,42 millions de ménages étaient en attente d’un logement social, dont 1,63 million pour une première attribution. Ce chiffre est sans précédent, il faut le mentionner ! Le taux de mobilité dans le parc social est également faible : à peine 8% des logements a été proposé à la location par mobilité des locataires en 2022. Avec la hausse des taux d’intérêt, les primo-accédants n’ont plus les moyens financiers d’acquérir leur logement. Quant au durcissement des règles d’attribution du prêt à taux zéro, il va exclure de fait les ménages les plus modestes. Ce qui fait regretter à Emmanuelle Cosse, présidente de l’Union Sociale pour l’Habitat, « le désinvestissement de la puissance publique du logement, dans sa dimension matérielle comme idéologique ».
Sans l’intervention publique, la production de logement abordable ne sera pas à la hauteur. C’est un levier indispensable.
La Métropole de Lyon a affiché une vraie ambition en la matière, il faut le souligner mais cette ambition de voir se construire au moins 5 000 logements abordables et 1 000 logements en bail réel et solidaire d’ici à 2026 n’est encore pas atteinte. Malgré des efforts notables, il y a une attribution de logement social pour 9 demandes sur le territoire métropolitain, et une attribution pour 14 demandes Lyon intra-muros.
A Vénissieux aussi, la pression est forte avec 8 demandes pour une attribution. L’ancienneté de la demande en 2022 était en moyenne de plus de 2 ans et le taux de rotation est faible, à 6,2%. La demande de personnes isolées est forte, à hauteur de 39% de la demande. La Sacoviv affiche par ailleurs un taux voisin de 30% d’accueil des publics prioritaires de toute catégorie. Comme tous les bailleurs sociaux, la Sacoviv devra faire face en 2024 à la crise énergétique, à la hausse des coûts des matières premières et l’envolée des prix.
Pour la Sacoviv, il s’agit de répondre à l’urgence sociale du moment tout en maintenant des investissements structurants pour se projeter à plus long terme. Votre président, Pierre-Alain Millet, va vous présenter, entre autres, les objectifs et grandes opérations qui attendent la Savociv en 2024. Avec le début des travaux de la rue Beethoven, les travaux de résidentialisation du Monery vont être lancés et je sais que ce sera un moment fort des douze mois à venir.
Je profite de ces vœux à la Sacoviv pour mettre en valeur le travail réalisé par Thierry Beaudoux, directeur de la SEM depuis fin 2015, parti à la retraite en décembre dernier. Sous son mandat, la Sacoviv a franchi des étapes, renforcé son développement et relevé de nombreux défis. Son engagement envers l’équité et la justice sociale a été exemplaire.
Je souhaite aujourd’hui la bienvenue à Roxane Michel, qui lui succède. Vous le savez, la Sacoviv participe très activement à notre politique de logement, comme un acteur indispensable et incontournable de notre territoire, toujours au service des familles vénissianes les plus fragiles.
Je voudrais saluer et remercier le personnel de la Sacoviv. L’ensemble de vos actions, le cœur de vos métiers, face à une précarité toujours plus vive de la population, montrent que l’on peut faire vivre au quotidien une vraie politique sociale du logement. Il y a beaucoup à faire, mais il y a aussi une fierté à se battre au quotidien pour le logement social, à se battre pour les politiques de proximité, ce sont des combats de terrain, âpres par les temps qui courent, des combats pour la dignité des hommes, femmes et familles de Vénissieux. Gardons cette fierté comme guide de nos actions et de nos déterminations. Je souhaite à chacun de vous, dans vos vies personnelles et professionnelles, une excellente nouvelle année 2024.
Je vous remercie.