Vernissage de « dessaisissement » œuvres de la donation Pascale Triol

Que dire du geste, de la générosité et du choix de Pascale Triol ? Un très grand merci, doublé d’une profonde, sincère et inestimable marque de reconnaissance de toute notre ville, de tous ceux, professionnels comme habitants, qui font vivre les arts plastiques à Vénissieux.

« Tout art est contemporain de son existence. Si une œuvre ne transcende pas son temps, elle n’est pas une œuvre d’art. L’œuvre se place au-dessus du collectif, au-delà de soi, sinon elle est un objet narcissique ». C’est ainsi que vous parlez de l’art, de la création, en des termes très justes, chère Pascale Triol. Mais alors, pourquoi une galeriste, commissaire d’exposition, et collectionneuse comme vous, choisit-elle un jour, de faire une double donation d’oeuvres de différents artistes, à la ville de Vénissieux ?

Je crois, si mes informations sont bonnes, que c’est à partir d’une phrase de Bernanos, reprise dans un film de Jean-Luc Godard, que l’idée a fait son chemin. Je vous cite à nouveau : « Quelle merveille que de pouvoir donner ce qu’on n’a pas, miracle de nos mains vides. Un collectionneur doit prêter, léguer. On n’est pas prioritaire de la création. Une œuvre n’est pas du domaine de l’avoir. Elle est du domaine de l’être ».

Que dire du geste, de la générosité et du choix de Pascale Triol ? Un très grand merci, doublé d’une profonde, sincère et inestimable marque de reconnaissance de toute notre ville, de tous ceux, professionnels comme habitants, qui font vivre les arts plastiques à Vénissieux.

J’y vois aussi de votre part, l’expression d’une confiance, à l’égard des politiques culturelles et populaires que nous menons depuis toujours, et une forme de reconnaissance, du travail mené par le service arts plastiques de notre direction des affaires culturelles, depuis 1970.

C’est en effet sous l’impulsion de Madeleine Lambert, alors conseillère artistique de la ville, qu’une collection de plusieurs centaines d’œuvres, environ 500, a été constituée par la ville, il y a maintenant plus de 40 ans. Avec ce souci, non pas de les accumuler, mais de les rendre accessibles au plus grand nombre, de les amener vers les habitants, et dans tous les quartiers.

Dans différents lieux publics, l’art circule : peinture, sculpture, gravure ou dessin, installation vidéo, photographie.

Le programme « Colporteur » (diffusion des œuvres hors les murs), initié en 2014, a permis de diffuser encore davantage les œuvres, en facilitant leur présentation au sein des ateliers, et bientôt dans certains établissement scolaires.

Les œuvres qui nous entourent, et que chacun peut voir dans l’espace public, font aussi partie de cette collection municipale. Faire vivre les arts plastiques à travers la ville et parmi les habitants, a été l’une des forces de la première résidence, cette année même, d’un plasticien de renommée internationale, Bruce Clarke.

Son œuvre murale a transformé un lieu en un endroit, reconnu de tous, comme une empreinte physique de l’art en milieu urbain.

Cette résidence d’artiste sera reconduite en 2016, avec un nouvel invité, pour favoriser la rencontre entre la création et les Vénissians.

Démocratiser la culture et faire vivre une démocratie de la culture, sans ségrégation sociale ni discrimination territoriale.

Vénissieux a, depuis toujours, actionné ces deux leviers. Ancrer l’expression artistique dans les quartiers, c’est offrir des possibles aux enfants, aux jeunes ou moins jeunes. J’en ai bénéficié lorsque j’étais adolescente, et je peux vous garantir que cela ne s’oublie pas. Les ateliers de pratiques artistiques amateurs, sont menés par des artistes professionnels, auprès de plus de 210 adhérents.

Chaque semaine, on compte 11 ateliers adultes, et 7 destinés aux enfants, 2 ateliers ouverts aux adolescents et enfin, 7 autres ateliers, dont la durée et le format, ont été aménagés spécialement pour accueillir les enfants, dans le cadre de la réforme du temps périscolaire.

Les ateliers destinés aux enfants sont installés dans des établissements scolaires, situés dans des quartiers variés de la ville, afin d’assurer un maillage du territoire, et d’en permettre l’accès à tous. Par ailleurs, et pour établir des ponts entre les pratiques amateurs et la création contemporaine, des sorties sont ponctuellement organisées, pour les adhérents. Cette année, ils se sont ainsi vu proposer des visites commentées, ici-même, à l’Espace arts plastiques, mais aussi à l’URDLA (centre international estampe et livre) à Villeurbanne, et à la Biennale d’art contemporain de Lyon.

En fin d’année scolaire, c’est aussi un rendez-vous annuel à la salle Joliot-Curie, où les créations, réalisées au fil des ateliers, sont présentées au public, à l’occasion d’une exposition où adultes, familles et enfants, se retrouvent.

Les expositions temporaires à l’Espace arts plastiques Madeleine Lambert apportent quant à elles, l’art contemporain au plus près des habitants : quatre expositions sont organisées par année, avec des artistes de la Région ou internationaux. Cette programmation vise à présenter la création actuelle, dans toute sa diversité : pluralité des formes, des générations d’artistes et des approches artistiques.

C’est cette culture populaire, que la donation de Pascal Triol vient renforcer. Nous la défendons âprement, ici à Vénissieux, nous la défendons contre les logiques libérales, contre les politiques d’austérité, qui menacent très gravement la culture en France.

Nous la défendons à travers le maintien et la contribution de Vénissieux, au 1% artistique. Nous la défendons contre ces discours populistes et rances, bien trop fréquents de nos jours, qui consistent à faire croire que les enjeux culturels sont secondaires, en temps de crise.

S’attaquer à la culture, c’est s’attaquer à l’histoire, au patrimoine, et à l’ambition même de la France. Voilà pourquoi chacun de nous doit se mobiliser, chacun de nous doit savoir que la culture est aujourd’hui en danger, qu’elle a besoin de nous.

Imagine-t-on la vie de nos quartiers et notre vivre ensemble, sans ce socle qui nous réunit, un spectacle, un festival, une musique, une image, une troupe de comédiens, et toute la diversité des métiers de la création.

L’exposition qui nous est donnée à voir aujourd’hui, Dessaisissement, présente des œuvres, dont Pascale Triol a fait don à la Ville de Vénissieux, dont elle s’est « dessaisie » en quelque sorte. N’est-elle pas l’illustration de ce que nous aimons par-dessus tout : partager collectivement des émotions.

Sachez, chère Pascale Triol, que la ville de Vénissieux saura être à la hauteur des œuvres que vous lui avez données.

Au nom de tous les Vénissians, au nom des artistes et professionnels ici présents, je vous adresse ma plus profonde reconnaissance, et je vous remercie.

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