Repas offert aux personnes âgées et retraités de la ville de Vénissieux

Retrouvez l’intervention de Michèle Picard à l’occasion du repas offert aux personnes âgées et retraités de la ville de Vénissieux

Lundi 10 décembre 2012.

Retrouvez l’intervention de Michèle Picard à l’occasion du repas offert aux personnes âgées et retraités de la ville de Vénissieux

Année après année, ce plaisir-là est intact. Celui de nous retrouver ensemble dans la simplicité, dans la modestie, dans le respect que toutes les générations vénissianes, à travers moi, vous adressent. Ce repas à l’approche des fêtes de fin d’année est chargé de sens, d’émotions aussi, c’est une tradition vénissiane dont on ne se passe pas.

Dans nos sociétés, les moments de fraternité, d’écoute et de partage, ne sont malheureusement pas si fréquents, alors profitons-en, et profitons des solidarités que nos aînés nous ont transmises à travers le temps, et à travers les luttes qu’ils ont menées, ici à Vénissieux. Oui, je vous le dis avec ma franchise, notre société ne remplit pas ses devoirs. Elle n’est pas à la hauteur des enjeux et des marques d’estime, qu’elle doit accorder au troisième âge. Et cette société dont je parle, elle commence par chacun de nous qui la composons.

On ne se parle plus, on ne s’attend plus, on ne se tend plus la main. A peine si l’on se croise, chacun replié sur ses petits égoïsmes. Nous ne faisons plus société. Il n’y a plus d’ensemble, juste des divisions. Il n’y a plus d’additions, juste des exclusions. Et l’on s’étonne, ou l’on feint de s’étonner, qu’après plus de 30 ans de libéralisme et d’individualisme forcené, la France ne sait plus accorder de place à sa jeunesse, aux plus de 55 ans, aux seniors. Les liens sociaux ont explosé, et cette belle idée du lien transgénérationnel, héritée du CNR, et qui est à l’origine du modèle social français, tombe sous les coups d’un capitalisme destructeur. Le cœur du problème, il est là et pas ailleurs.

Redonnons la priorité à l’humain, redonnons du sens au mot commun, retrouvons les chemins que nous avons perdus ou égarés : la solidarité, la justice sociale, le respect de l’autre, des plus jeunes et des plus anciens. A force de détricoter le pacte républicain et le vivre ensemble, la frénésie libérale, du toujours plus, du tout, tout de suite, nous laisse une société en lambeaux. C’est cela qu’il faut changer, et le plus vite sera le mieux.

Toutes les études le montrent, et les associations caritatives en sont les premiers témoins : le 3ème âge subit de plein fouet la crise, et s’appauvrit à une vitesse très inquiétante. Les retraités représentent le tiers des ménages en France, on peut les croire détenteurs d’un beau patrimoine, c’est le cas d’une minorité, mais ce n’est pas le cas de la très grande majorité d’entre eux.

65% des retraités sont issus des milieux populaires (anciens ouvriers, employés ou agriculteurs). Pour eux, la retraite médiane se situe autour de 1 100€ par mois. Ce qui veut dire que plus de 50% des retraités vit avec tout juste le smic, et une million d’entre eux, principalement des femmes, se retrouve avec des revenus inférieurs au seuil de pauvreté.

Expliquez-moi, après avoir travaillé toute une vie, après avoir élevé des enfants, comment on vit avec 628 euros de pension minimum vieillesse par mois ! C’est indécent et c’est révoltant. Mais il faut bien se rendre compte que nous ne sommes qu’au début de ce mouvement, et de cette bascule massive de nos aînés vers la précarité. Toutes les réformes sur le régime des retraites de cette dernière décennie (la plus injuste et la plus dangereuse étant l’œuvre du tandem Sarkozy-Fillon) font baisser encore le niveau médian des nouveaux retraités, à moins de 850 euros par mois. Le pouvoir d’achat s’effondre, et la santé pour les séniors devient un luxe, ce qui est gravissime.

La hausse des tarifs des mutuelles, le forfait hospitalier, les déremboursements de nombreux médicaments remettent en cause le principe universel de la santé pour tous. La question qui se pose, c’est comment les personnes âgées vont faire pour se soigner ? Aujourd’hui, elles consacrent en moyenne 90€ par mois, soit 5,8% de leurs revenus. En 2020, les dépenses santé pour les retraités devraient représenter 10% de leurs pensions. Le phénomène qui s’annonce est clair : alors que beaucoup de Français n’accèdent déjà plus aux soins, ou les reportent, les prochains touchés sont les seniors. On ne peut pas laisser faire ça, tolérer une médecine à deux vitesses, à un âge où on en a le plus besoin, c’est scandaleux.

Là encore, un droit universel est dans les faits gravement remis en cause, tout comme le droit au logement, ou encore le droit à une vie digne. Est-il admissible de laisser des personnes âgées seules, dans des logements qu’ils ne parviennent plus à chauffer, privées d’eau chaude, privées de tout confort ? Il faut tordre le cou à un cliché : le patrimoine, souvent durement acquis tout au long d’un vie, fragilise désormais les retraités. Il faut le savoir : 40% des propriétaires occupants en France sont des propriétaires précaires, éligibles aux aides de l’agence nationale pour l’amélioration de l’habitat. Quant à la précarité énergétique, 55% des ménages touchés ont plus de 60 ans !

Ce tableau n’est pas exagéré, il est surtout triste. Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a réparé une injustice (le retour à une retraite à 60 ans pour ceux qui ont commencé à travailler tôt), mais ne s’est pas attaqué au cœur du problème : la décote généralisée des pensions, et la sauvegarde du système de retraites par répartition en prenant l’argent là où il sommeille : dans les revenus du capital, dans les transactions boursières. Au contraire, à travers le projet de loi de financement de la sécurité sociale, une nouvelle taxe annuelle de 0,15%, puis 0,3% en 2014, vient ponctionner encore un peu plus le pouvoir d’achat en berne des personnes âgées. Avec leurs revenus modestes, les retraités se retrouvent bien souvent à soutenir financièrement leurs cadets. Dans bien des cas, ils sont les seuls à avoir un revenu régulier sur trois générations ! Jusqu’à quand pourront-ils venir en aide à leurs proches, jusqu’à quand pourront-ils offrir un cadeau à leurs petits-enfants ? Ce sont des questions simples, des questions de la vie de tous les jours, mais elles méritent d’être posées, et elles méritent des réponses humaines, des réponses concrètes.

Mais rassurez-vous, la ville de Vénissieux poursuit, et poursuivra encore ses efforts, pour offrir au 3ème âge ce qui lui est dû : vivre dans la dignité, et vivre selon ses désirs d’autonomie, de maintien à domicile, ou de plus grande prise en charge.

Les portages de repas sont ainsi passés de 70 à 91 repas quotidiens. 55 personnes bénéficient de services de soins infirmiers à domicile, et environ 250 personnes bénéficient des aides à domicile. Il y a nos résidences rénovées Raynaud et Bonin, et le Foyer-Soleil. Notre régie de restauration scolaire et sociale, dont tout le monde, je le crois, apprécie la qualité, sert 76 repas par jour aux personnes âgées dans nos résidences. Outre La Solidage, un second Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes ouvrira ses portes en septembre 2013, à Vénissieux, pour répondre aussi à une urgence, et augmenter le nombre de places médicalisées pour dépendance dans notre commune. Notre présence, elle est là, concrète, et notre ambition est à la hauteur du budget global que nous consacrons au 3ème âge : 3,75 millions d’euros.

Mais les chiffres ne font pas tout, l’attention, l’écoute, la participation à la vie de notre commune, me semblent tout aussi importantes. La semaine Bleue, l’accès aux activités culturelles, le rôle de l’OMR, les liens avec la semaine du goût, mais aussi l’activation du plan canicule, montrent combien notre ville tient à ses aînés. Je le dis souvent aux jeunes vénissians : on ne peut pas se construire sans racines. Et bien ces racines, c’est vous, cette mémoire vénissiane que l‘on partage, c’est vous, et l’expérience et la sagesse que l’on recherche, Vénissieux la trouve en vous.

Gardons ensemble ces liens solides et solidaires que nous avons tissés mutuellement au fil du temps. Ils sont notre réconfort, ils sont notre avenir.

Je vous souhaite à tous et à toutes de très bonnes fêtes de fin d’année et je vous remercie.

Remerciements à :

la Régie de restauration scolaire et sociale, Richard MOUTON,

aux élèves du lycée Hélène Boucher,

aux bénévoles de l’OMR,

aux services Ville – DSAS

qui contribuent à ces journées.

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