Rencontre-Dialogue avec Pascale Triol, donatrice

« Votre engagement politique dans l’éducation artistique qui m’importe tout particulièrement, adossé à la constitution de votre collection, les compétences de Mme Lonardoni, directrice du service arts plastiques, et mon histoire personnelle, ont été à la source de ce contact avec la ville de Vénissieux ».

Notre ville est fière d’accueillir, ce soir, Mme Pascale Triol, collectionneuse et ancienne galeriste. Au nom de l’équipe municipale, au nom de tous les Vénissians, je souhaiterais vous adresser mes remerciements les plus chaleureux.

Merci pour cette donation exceptionnelle au service de la culture. Merci de vouloir partager, avec les Vénissians, les richesses de votre collection. Des œuvres signées Jean-Philippe Aubanel, Christian Babou, Bertrand Bajard, Jean Bertholle, Christine Crozat, Geormillet, Jean-Pierre Giard, Isidore Isou, des artistes, pour la plupart, de notre région. Peintures, dessins, sculptures, estampes, ce sont quelque 32 œuvres d’arts qui viennent aujourd’hui enrichir notre collection d’œuvres contemporaines déjà importante et très diversifiée (près de 500 pièces).

Cette donation, centrée sur l’esthétique des années 80, comporte également un volet de créations plus récentes : des œuvres multiples qui nous permettront de mieux les partager, de rapprocher l’art et la population, un art hors les murs, accessible au plus grand nombre. Cette dernière génération d’artistes représentés dans cette collection, travaillent à la désacralisation de leurs œuvres. Une démarche qui s’inscrit pleinement dans la politique culturelle de notre ville : l’accès à la culture pour tous, l’éducation, le vivre ensemble … 3 de ces œuvres sont exposées depuis plusieurs mois, dans cette salle du conseil municipal : l’œuvre de Geormillet :  « L’oiseau dans l’azur » ; celle d’Isidor Isou : « Commentaire sur Van Gogh »  et celle d’Aubanel : « Le Regard ».  Vous pouvez également découvrir une sculpture d’Ughetto. Fin 2015, une exposition mettra en valeur cette donation et permettra au public de prendre connaissance de l’ensemble de ces œuvres.

« Quelle merveille que de pouvoir donner ce qu’on n’a pas, miracle de nos mains vides. Un collectionneur doit prêter, léguer. On n’est pas propriétaire de la création. Une œuvre n’est pas du domaine de l’avoir. Elle est du domaine de l’être ».

Cette phrase reprise par Jean-Luc Godard dans le film « Nouvelle vague » et que vous affectionnez particulièrement, est à votre image. Vous portez en vous cette exigence viscérale de défendre une culture populaire, ni élitiste, ni formatée. Cette vision d’une culture qui ne s’achète pas, mais se partage, éveille la curiosité, interroge, interpelle, provoque, mais aussi et surtout rapproche. Les collectionneurs sont aussi des découvreurs de talents. Ils contribuent à faire connaître la diversité et la richesse de notre culture et mettent en lumière des courants peu ou pas représentés.

Au niveau national, la culture demeure le parent pauvre du gouvernement. Année après année, le budget national de la culture fond comme neige au soleil : moins 4,3 % en 2013, moins 2 % en 2014. Les conséquences pour le monde de la culture sont catastrophiques : abandon de nombreux projets, coups de rabot sur les subventions, austérité déclarée pour les DRAC et équipements culturels….

L’Etat se désengage sur les communes, déjà asphyxiées financièrement. Et ce sont elles, aujourd’hui, qui portent à bout de bras le monde de la création. Et pourtant, nos villes sont elles aussi frappées de plein fouet par ces politiques d’austérité. Elles qui subissent depuis plusieurs années des baisses de dotations, au désengagement de l’Etat qui leur confère de nouvelles missions sans compensation financière, doivent faire face aujourd’hui au plan d’économies de 11 milliards d’euros qui leur est imposé.

Comme toutes les villes de France, Vénissieux sera fortement impactée. En effet, la chute des dotations de l’Etat va entraîner une perte sèche de 7 millions d’euros dans notre budget, d’ici 2017. C’est considérable et sans précédent. La mise en place de la métropole, depuis le 1er janvier, n’arrange en rien la situation. Car ne nous leurrons pas, cette politique d’austérité qui frappe toutes les villes de l’agglomération, touchera également la métropole. Des projets d’équipements structurant vont être ajournés, voire enterrés. La mise en veille du projet de la Préfabrique Opéra, après le retrait du financement de Lyon, en est déjà la preuve.

Nous devons aussi sortir du discours populiste qui se répand aujourd’hui. Oui, il y a des priorités, mais la culture a un rôle important à jouer pour sortir de la crise. Au contraire, dans notre société morcelée, la culture est un formidable levier pour dynamiser nos quartiers et rapprocher les habitants.

Dans ce contexte difficile, Vénissieux maintient le cap en développant une politique culturelle d’ambition. La culture représente 9% du budget global de la ville. Nous sommes déterminés à démocratiser la culture, la développer dans tous les quartiers, briser les frontières tant géographiques que mentales, la rendre accessible au plus grand nombre, aux habitants, aux enfants, à tous les Vénissians.

Cette exigence de démocratisation de la culture se retrouve sur l’ensemble de notre territoire : C’est le théâtre, la médiathèque, les bibliothèques de quartier, le cinéma Gérard Philipe, l’école de musique Jean Wiener, les ateliers Henri Matisse, l’espace d’arts plastiques Madeleine Lambert. Le projet Bizarre, autour des musiques urbaines, s’inscrit également dans cette optique de dynamique des quartiers.

Démocratiser la culture, c’est aussi faire en sorte que les Vénissians ne soient pas simplement des spectateurs du monde de la création, mais des acteurs à part entière.

Initiation, implication, éducation musicale, poétique, picturale ou illustrative, émancipation. La dimension culturelle est double : collective pour le vivre ensemble, individuelle pour l’éveil de l’esprit critique.

Avant de conclure, je souhaiterais vous lire un passage du courrier que Mme Triol m’a adressé en mai dernier, pour m’informer de son projet de dons  : « Votre engagement politique dans l’éducation artistique qui m’importe tout particulièrement, adossé à la constitution de votre collection, les compétences de Mme Lonardoni, directrice du service arts plastiques, et mon histoire personnelle, ont été à la source de ce contact avec la ville de Vénissieux ».

Aujourd’hui, c’est un honneur pour notre ville de recevoir ce don.

Je puis vous assurer de mon total  engagement à poursuivre, avec l’équipe municipale, notre politique culturelle ambitieuse pour tous les Vénissians.

Je vous renouvelle tous mes remerciements.

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