Conseil Municipal du 25 mars 2013 : les arrêtés interdisant les expulsions locatives, les coupures d’énergies et les saisies mobilières.

Ce qui motive avant tout ces arrêtés, c’est une réaction d’ordre humain, une question de dignité, à hauteur d’hommes justement. Comment laisser faire, comment tolérer de telles pratiques, à hauteur d’hommes encore une fois ! Comment ne pas voir, qu’en procédant à des expulsions, on précipite la chute d’hommes, de femmes, de familles avec des enfants, déjà fragilisés.

Le  mardi 26 mars 2013.

Retrouvez l’intervention de Michèle PICARD lors du Conseil municipal  concernant les arrêtés interdisant les expulsions locatives, les coupures d’énergies et les saisies mobilières.

Ce qui motive avant tout ces arrêtés, c’est une réaction d’ordre humain, une question de dignité, à hauteur d’hommes justement. Comment laisser faire, comment tolérer de telles pratiques, à hauteur d’hommes encore une fois ! Comment ne pas voir, qu’en procédant à des expulsions, on précipite la chute d’hommes, de femmes, de familles avec des enfants, déjà fragilisés. Est-ce le rôle de la société de contribuer à leur déchéance, et d’accentuer encore plus leurs difficultés ? Quand un système fonctionne à l’envers, il faut savoir le gripper, s’y opposer, et lui dire Non. Voilà le sens premier de ces arrêtés : ne pas tolérer, ne pas excuser l’intolérable.

Il y a aussi le contexte actuel déplorable et cynique, fruit de la spéculation immobilière d’un côté, et du rejet des plus faibles de l’autre. 20 000 enfants sont sans toit en France. Est-ce digne de notre pays, en 2013 ? 150 000 personnes vivent dans la rue, 700 000 sont privées de domicile personnel, le 115 est débordé, dans l’incapacité de répondre à plus de 80% des demandes d’hébergement. Est-ce digne de notre pays ? Près de 4 millions de ménages sont touchées par la précarité énergétique, plus de 580 000 coupures d’énergies ont été effectuées en 2012. Là encore, est-ce digne de notre pays ? Laisser des familles, bon nombre de retraités également, dans le froid, sans eau chaude, dans des logements insalubres, aux conditions de sécurité déplorables, c’est non seulement insupportable, mais cela peut aussi s’avérer dangereux pour le voisinage, et être source d’accidents dramatiques, comme on l’a vu en septembre dernier à Saint-Denis. Dans les squats, dans ces favelas des temps modernes qui se développent dans nos villes, on frôle bien souvent la catastrophe, et heureusement que nos services interviennent à travers des dispositifs de prévention et de sécurisation des populations.

Qu’attend-on pour agir, qu’attend-on pour imposer un droit constitutionnel, le droit au logement ? Voilà les questions humaines, les questions de dignité, et les questions de sécurité que portent ces arrêtés, des questions simples qu’il faut incarner. Car si nous en sommes là aujourd’hui, c’est bien le résultat des politiques nationales catastrophiques, menées depuis de nombreuses années : baisse de l’aide à la pierre et des APL, racket sur le 1% logement (0,45 aujourd’hui), une loi SRU pas respectée par plus d’1/3 des communes, une loi DALO en forme de coquille vide, et un État qui n’a cessé de se désengager pendant plus d’une décennie. En parallèle, le libéralisme a fragilisé de nombreuses familles et accentué la pauvreté. Salaires à la baisse, statuts précaires, perte d’un emploi : il suffit de peu de chose pour éprouver des difficultés à payer son loyer, des loyers, rappelons-le, qui ont été multipliés par 2,5 en l’espace de15 ans ! Certains ménages sont ainsi contraints de consacrer + de 50 % de leurs revenus pour se loger, qui peut s’étonner dès lors de l’extrême précarité actuelle ? Voilà pourquoi nous demandons à l’État de mettre en place un véritable service public du logement.

Contrairement à ce que vous affirmez Monsieur Girard, il ne s’agit pas d’instrumentaliser la pauvreté (nos services et partenaires sociaux, qui travaillent sur le terrain et au quotidien pour trouver des solutions avant le drame des expulsions, sauront apprécier la nature méprisante de ces propos), il convient de sortir de l’inaction et d’obtenir des avancées. L’argument que vous avancez dans une ville qui compte plus de 50% de logements sociaux se passe de commentaire, mais je préfère fermer là cette parenthèse. Obtenir des avancées, c’est ce que les villes de Vénissieux, Vaulx-en-Velin, Grigny, Pierre Bénite et Givors ont fait. Nous avons été reçus par la préfète déléguée pour l’égalité des chances, madame Aimée Dubos, laquelle s’est engagée à travailler en amont avec les différentes cellules de veilles. Consciente des risques engendrés par l’utilisation de moyens de substitution pour s’éclairer ou se chauffer, elle interviendra auprès d’ERDF-GDF, afin que les maires soient informés en amont des réductions et des coupures.

Nous sommes les courroies de transmission d’un combat engagé depuis des années, avec les associations, avec les progressistes, nos démarches pour une vie digne n’ont qu’un seul but : obtenir enfin un véritable droit au logement pour tous nos concitoyens. Que le chemin soit long et difficile ne m’effraie pas, comptez sur moi, en tout cas, pour m’y engager chaque année.

X