Le 2 octobre 2012
Retrouvez l’intervention de Michèle PICARD sur le rapport N°1 « Dotation de Développement Urbain 2012 – Opérations éligibles», lors du conseil municipal du 1er octobre 2012
Depuis des années, les communes perdent progressivement leur autonomie financière, avec une part des recettes fiscales propres qui s’amenuise, et une dépendance de plus en plus forte aux différents versements de l’État.
Il faut rappeler aux habitants de Vénissieux que la fiscalité directe ne pèse plus que 30% des recettes de fonctionnement, et que les recettes maîtrisées par notre ville ne représentent plus, par exemple, que 38% du budget primitif 2012. Nous sommes donc tributaires des dotations et subventions accordées par l’État, dont la DDU dont nous parlons ce soir, par la Région, par le Département, et des compensations fiscales versées par le Grand Lyon. Le poids de ces recettes indirectes avoisine dorénavant les 62%. Ce petit rappel pédagogique, je le crois nécessaire, pour mieux comprendre les équilibres budgétaires, de plus en plus fragiles, que les collectivités locales peinent à trouver. Et je n’inclus pas dans cette liste de difficultés, les emprunts toxiques, nous n’en avons pas à Vénissieux, les durcissements des conditions de prêts des banques, et les dégâts provoqués par la perte de la TPU.
La DDU 2012, dont nous débattons, est en baisse par rapport à 2011. ça ne remet pas en question, ni le budget primitif 2012, ni les finances saines de notre ville. Mais à travers cette nouvelle donne se pose une vraie question : à l’heure de la rigueur budgétaire, je dirais même à l’heure des discours obsessionnels sur la rigueur budgétaire à tous les échelons, la situation risque de devenir explosive pour les habitants, pour les collectivités, pour l’emploi de proximité. Les premiers éléments donnés par le nouveau gouvernement sont à ce titre très inquiétants.
Le gel des dotations pour les collectivités a été annoncé en juillet par le Ministre du Budget, Jérôme Cahuzac. Et il y a quatre jours, la ministre de la décentralisation, Maryse Lebranchu, a fait part d’une baisse de 2,25 milliards d’euros des dotations aux collectivités, pour la période 2013-2015. Le député PS René Dosière a prescrit, lui, une économie de 18 à 20 milliards sur le budget de l’Etat consacré aux collectivités, stigmatisant la flambée de dépenses des communes et intercommunalités. Si cette politique nationale, sous les diktats de l’Europe libérale, est mise en place, alors le remède sera pire que le mal !
Nous appelons au contraire à une relance de l’activité économique locale, dans le cadre d’une gestion saine, comme c’est le cas à Vénissieux. Étouffer les collectivités, c’est étouffer l’emploi de proximité, c’est étouffer les PME-PMI, c’est étouffer nos capacités d’investissement, soit au bas mot les ¾ de l’investissement public en France ! Étouffer les collectivités, c’est aggraver les difficultés sociales des habitants, c’est mettre à mal les services publics de proximité, alors que jamais depuis l’après-guerre, l’urgence et les besoins de la population n’ont été aussi grands ! Je le dis et je le redis : attention, nous sommes en train de créer un remède pire que la maladie, et de nombreux économistes, dont le prix Nobel en 2001, tirent déjà la sonnette d’alarme : « l’austérité est un désastre ! », insistent-ils, et ce désastre est en cours en Grèce, en Espagne ou ailleurs.
On ne peut pas laisser nos quartiers, nos populations, se débrouiller avec une crise d’une violence inouïe, une crise dont ils ne sont pas responsables, mais qui les accable en tout premier lieu. Les années Sarkozy ont massacré le lien social, à travers une politique fiscale hallucinante, et une RGPP en forme de terre brûlée. Il faut lire à ce sujet, le rapport qui vient d’être publié sur la révision générale des politiques publiques. Le bilan est sans appel : brutalité de la méthode, démarche en vase clos, mesures imposées, verticales et cloisonnées, sans dialogue, voilà les termes employés, ils se passent de commentaires !
Le gouvernement ne doit pas poursuivre une RGPP qui ne porterait pas son nom, mais dont les effets seraient identiques, pour les agents de la fonction publique, et désastreux pour tous les citoyens.
Nos populations, le vivre ensemble, le lien social, ont besoin de ces acteurs et interlocuteurs de terrain, que sont les services publics de proximité, indispensables et irremplaçables. C’est un premier point.
Le deuxième qui consiste à dire que les dépenses des collectivités sont responsables des déficits actuels, est une supercherie. Pourquoi ? Parce que deux données essentielles sont passées sous silence. Entre 1998 et 2008, la population française a augmenté de 10%, et les dépenses des collectivités ont répondu mécaniquement à cette croissance démographique. Enfin, il a bien fallu compenser les transferts de compétences et les désengagements de l’État, mis en place en 2004, dans le cadre de la loi relative aux libertés et responsabilités locales. Je veux bien qu’on ouvre le débat, mais je ne veux pas qu’on le tronque, ni qu’on le caricature, en employant des contrevérités. Décentralisation, réforme des collectivités, nous attendons une vraie rupture avec les politiques qui ont été menées depuis 10 ans et, en ce qui concerne les communes, la réaffirmation de leur rôle pivot et moteur, au cœur d’une démocratie de proximité rénovée, plus en phase avec son siècle et les attentes de nos populations.

