Signature de la Convention Locale d’Application du Contrat de Ville de Vénissieux 2024-203

Jeudi 19 septembre 2024

Il y a matière à s’inquiéter, du moins à s’interroger. Que vont devenir les politiques de la ville en France ? Nul ne le sait.

Dans le viseur après les émeutes de juin 2023, elles ont fait l’objet de critiques hâtives et précipitées, et pour la plupart mal intentionnées ou instrumentalisées. Entre les lignes, en stigmatisant leur inefficacité et leur insuffisance, certains dénonçaient une gabegie des finances publiques, une façon à peine voilée de dire « laissons les plus modestes entre eux et les quartiers populaires se débrouiller ». A les entendre, la ségrégation territoriale a de beaux jours devant elle.

L’autre inquiétude est liée à la situation politique de notre pays depuis la dissolution. Quelles sont les intentions du gouvernement Barnier ? Quelles seront les orientations générales du budget 2025 de la France ? Les collectivités locales seront-elles à nouveau mises à contribution dans le cadre de la baisse du déficit et de coupes dans les dépenses publiques déjà envisagées ? Toutes ces questions, légitimes, sont à ce jour sans réponse.

La meilleure façon d’y répondre, c’est d’agir. Avec et pour les habitants et avec nos partenaires, le maillage associatif et tous les acteurs de terrain. Je ne vois pas d’autre réponse et c’est celle-là que nous paraphons aujourd’hui avec cette Convention Locale d’Application.

Je tiens dans un premier temps à remercier l’État et la Métropole en présence de Madame Salwa Philibert, Sous-préfète chargée de la politique de la ville, et de Monsieur Renaud Payre, Vice-président de la Métropole de Lyon.

Avec les associations, tous les acteurs de terrain, nous avons acquis une vraie culture partenariale, de travail collégial, d’échanges d’expériences et de savoir-faire entre les hommes et les femmes de nos différents services.

Cette culture, nous l’avons forgée dans le temps, à travers les programmes de rénovation urbaine, Vénissy, Armstrong, et aujourd’hui Minguettes-Clochettes en cours de réalisation. Elle doit nous permettre de mieux cibler les actions à entreprendre, d’améliorer les dispositifs existants, d’être plus précis dans les besoins et demandes des habitants.

On parle, à juste titre, des politiques de la ville comme un levier pour l’aménagement de nos quartiers populaires, pour le cadre de vie, la fonctionnalité des espaces publics, mais ce que l’on ne met pas assez en valeur, c’est la mobilisation et l’engagement des habitants, des associations, des acteurs sociaux, économiques, culturels, dans la réalisation d’un projet collectif, qui concerne le quotidien de chacun. Les politiques de la ville rapprochent les habitants, favorisent le vivre ensemble, il faut le souligner.

Cette convention, pour qu’elle réussisse pleinement, doit partir du terrain, faire l’objet d’analyses précises des besoins et demandes des Vénissians, pour revenir sur le terrain au moment de la mise en œuvre des nouveaux dispositifs.

Chacun de nous a conscience de la dureté actuelle. Les crises se succèdent, mais pour les plus fragiles, elles s’agrègent, s’accumulent, non pas l’une après l’autre, mais toutes en même temps. Les difficultés deviennent insurmontables dans les domaines les plus essentiels : se loger, se nourrir, se soigner.

L’inflation, la chute libre du pouvoir d’achat, la flambée des prix et des énergies provoquent des décrochages de plus en plus prononcés entre les différents territoires de notre Métropole.

L’extension de la géographie prioritaire à Vénissieux, avec les trois nouveaux quartiers Les Maronniers, La Borelle et Monery, illustre l’extension sociale de la précarité.

Aujourd’hui, plus de 29 000 vénissians vivent en QPV, soit environ 43% de notre population, donc presque un habitant sur deux.

Sur la période 2013-2019, la Conférence Territoriale des Maires (CTM) des Portes du Sud, qui réunit les villes de Corbas, Feyzin, Saint-Fons, Solaize et Vénissieux, a connu une augmentation de 17% de la pauvreté, soit la hausse la plus importante parmi les CTM les plus pauvres.

Face à cette situation, il n’y a pas de temps à perdre. Il nous faut dès aujourd’hui rendre opérationnelles les trois priorités que cette convention locale d’application s’est fixées. Vivre dans des territoires où l’écologie s’allie à la justice sociale ; des territoires où l’émancipation des jeunes et de tous les habitants est possible ; enfin, des territoires où le bien-être est privilégié.

Sous ces thématiques, s’inscrivent des actions concrètes pour améliorer l’accès au logement, encourager la mobilité, agir en matière d’éducation et de citoyenneté, favoriser l’accès aux soins, se sentir en sécurité dans son quartier, lutter contre le non-recours aux droits et la fracture numérique.

Nous avons par ailleurs insisté pour ajouter à cette liste des actions concernant l’égalité femmes-hommes, la réappropriation de l’espace public par les habitants et les partenaires ou encore l’accompagnement des personnes âgées.

Dans les faits, des actions ont déjà été menées dès cet été portant sur la parentalité, l’environnement, le sport pour tous et la culture populaire, qui est allée à la rencontre des habitants à Pyramide, Édouard Herriot ou dans d’autres quartiers. Ces actions « Quartiers d’été » se sont déployées dans tous les QPV de la ville pour faire des lieux publics un carrefour du vivre et du faire ensemble.

Ne demandons pas aux politiques de la ville ce qu’elles ne sont pas en mesure de faire : se substituer au droit commun. Ça n’est ni dans le champ de leurs compétences, ni leurs objectifs.

Les politiques de la ville viennent en complément du droit commun et de la présence des services publics d’État dans les quartiers populaires. Police, justice, éducation, santé, aucun QPV ne doit être dépourvu des missions régaliennes de l’État. C’est bien la continuité territoriale et républicaine qui doit être assurée et qui est en jeu, ni plus ni moins. Il faut rappeler ce préalable pour ne pas entretenir de confusion.

J’adresse une question simple aux détracteurs des politiques de la ville. Sans ces politiques-là, où en serions-nous aujourd’hui ? Quelle serait la situation des plus fragiles face à des crises qui les impactent plus durement qu’ailleurs ? Si l’on n’investit pas financièrement, humainement et politiquement dans les quartiers populaires, croyez-vous raisonnablement qu’ils s’en sortiraient par eux-mêmes ou qu’ils seraient laissés à l’abandon ?

Il faut regarder la réalité en face : sans les politiques de la ville, la situation aurait empiré à un point que beaucoup auraient du mal à imaginer, par méconnaissance, pour ne pas dire par indifférence aux difficultés quotidiennes que rencontrent de nombreuses familles.

Je ne cautionnerai jamais toute forme de démission dans la lutte contre la ségrégation territoriale et sociale, je me battrai toujours pour la défense des plus modestes, pour l’amélioration du cadre de vie des quartiers populaires, pour qu’il existe, là comme ailleurs, des possibles ! Si nous perdons cette ambition, le pacte républicain aurait-il encore un sens ?

C’est la raison pour laquelle je tiens à saluer encore une fois tous nos partenaires institutionnels, associatifs, tous les Vénissians et acteurs de terrain qui vont s’investir dans cette Convention Locale d’Application du Contrat de Ville de Vénissieux. Un immense chantier nous attend, montrons-nous collectivement à la hauteur de son défi.

X