Festival Essenti’ [Elles]

… »La place des femmes dans notre société, dans notre ville, leur représentation dans l’imaginaire collectif, constituent un enjeu de civilisation. « …

La crise sanitaire nous a amené à imaginer et concevoir cette édition numérique de notre festival Essenti’elles. Je remercie une nouvelle fois nos agents, équipements et services publics de proximité pour leur réactivité et la poursuite de leurs missions dans un contexte difficile. Bien sûr, rien ne remplacera le contact humain, les échanges et les rencontres in situ avec les artistes, spécialistes et intervenants en matière du droit des femmes, ou plutôt des droits des femmes. Pour autant, la pandémie actuelle ne doit pas reléguer à l’arrière-plan les combats que notre ville a engagés depuis des années. La place des femmes dans notre société, dans notre ville, leur représentation dans l’imaginaire collectif, constituent un enjeu de civilisation. Je le dis souvent, ce combat n’est pas le combat des femmes contre les hommes, mais le combat de tous contre l’indifférence et les violences conjugales, contre les discriminations et les inégalités sociales, contre le sexisme et les disparités salariales injustifiables.

La situation de crises multiples que nous traversons montre à quel point nous devons nous mobiliser et agir au quotidien. Lors des deux périodes de confinement, les signalements des violences conjugales ont augmenté respectivement de 40 % au printemps dernier et de 60 % cet automne. Ces indices ne sont pas bons, ni en France, ni en Europe, où l’OMS a enregistré une hausse de 60 % des appels de femmes victimes conjugales. A ce constat alarmant s’ajoutent les effets de la crise économique. Les étudiants, chômeurs, intérimaires, salariés, payent au prix fort le ralentissement, voir l’arrêt de certains secteurs économiques. D’ici à la fin de l’année 2020, un million de Français supplémentaires auront basculé dans la pauvreté, selon les associations caritatives. Parmi eux, une majorité de femmes, contraintes à des temps partiels subis, à des contrats intérimaires et précaires qui les ont fragilisées dès les premiers mois de la pandémie. Surreprésentées dans les secteurs sociaux, tels que les services, la distribution, le tourisme et l’hôtellerie, bon nombre d’entre elles ont subi d’emblée les premières vagues de licenciements ou ont eu recours au chômage partiel. Accaparées par les tâches quotidiennes et la garde des enfants pendant les confinements, d’autres ont éprouvé d’énormes difficultés à mener de front vie professionnelle et vie privée.

La directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, a alerté les pouvoirs publics dans une récente tribune. Selon elle, la pandémie pourrait mettre à mal les progrès qui ont été réalisés dans le domaine de l’égalité salariale et de la parité.

Dès aujourd’hui, notre mobilisation doit être totale. Dans le contexte qui est le nôtre, les années qui viennent s’annoncent déterminantes en matière des droits des femmes. Il nous faut avancer collectivement, serrer les rangs, sans quoi la crise creusera encore plus les inégalités femmes-hommes et provoquera un mouvement de recul dans de nombreux domaines. Accès à un logement digne et décent, notamment pour les familles monoparentales, accès à la santé, accès à l’éducation, accès à des statuts plus pérennes et sécurisés dans le monde du travail et à l’égalité salariale, accès à la justice dans le cadre des violences conjugales, partout, nous devons renforcer les droits les plus universels des femmes, trop souvent rognés ou pas respectés. Rien ne changera fondamentalement sans la détermination politique et la présence de l’État. Nous le savons, l’Etat doit aller beaucoup plus loin que les effets d’annonces ou les déclarations de bonnes intentions. Les résultats des mesures prises resteront limités, voire anodins, si l’accompagnement des politiques nationales ne suit pas sur le terrain. L’exemple du Grenelle des violences conjugales est parlant. Il a suscité autant d’espoir que de déception. La prise de conscience de ce fléau est louable, mais les demi-mesures ne suffisent pas. A ce sujet, les associations ont vite dénoncé les limites du texte et pointé l’absence des mesures de prévention à l’école, des mesures de formation inadaptées, ou encore le manque de places d’hébergement dédiées et financées. De même, où est la cohérence  dans la tentative de privatisation du 3919, contre laquelle nous nous sommes opposés et à laquelle, sous la pression, le gouvernement a finalement dû renoncer.

Rien n’égalera le régalien, mais rien n’aura autant d’efficacité que les politiques de proximité des collectivités. C’est dans cette articulation entre la loi et la réalité du terrain, entre la volonté politique, les moyens qui l’accompagnent, et son application au quotidien que se joue et se gagnera l’égalité femmes-hommes. Par leur proximité avec les habitants et la présence de ses services publics, les collectivités locales occupent une place centrale, inégalable dans le déploiement de missions et de dispositifs décentralisés au service de la justice et de l’équité sociales.

Notre ville le montre année après année. Elle sait innover, initier, agir, rester  exemplaire et à la pointe du combat au coeur de l’agglomération lyonnaise. Convention avec l’association Viffil-SOS Femmes, logements d’urgence, financement d’une intervenante sociale au commissariat, plan d’actions pour l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, appel à projet La preuve Form’elles qui a rencontré un vif succès dans le cadre de la pratique sportive féminine, autant d’actions concrètes qui illustrent la détermination de notre ville. Cette année encore, le travail mené dans les six EPJ sur la valorisation des femmes célèbres à travers la réalisation de six vidéos et la création de l’affiche s’inscrit dans la durée, dans ce temps long de la sensibilisation et de l’éducation. La conférence sur le sexisme ordinaire, intitulée «  les femmes, moins capables que les hommes ? », s’attaquera à tous ces stéréotypes patriarcaux que nos sociétés véhiculent toujours, souvent sans s’en rendre compte. La vidéo de présentation de l’artiste Olivia Hernaïz, qui a conçu un jeu autour des obstacles à franchir pour une femme dans le monde de l’art,  prouve une nouvelle fois qu’aucun univers n’est épargné par le sexisme.

Je suis convaincu que cet enjeu des droits des femmes est un enjeu de société majeur, auquel j’entends donner une résonance forte à Vénissieux comme à la Métropole en tant que vice-présidente chargée de la lutte contre les discriminations et de l’égalité femmes-hommes. D’Olympe de Gouges aux Suffragettes, de Simone Veil à Gisèle Halimi, nos actions pour l’égalité femmes-hommes s’inscrivent dans une longue lignée historique. A nous d’être à la hauteur de nos devancières pour que chaque jeune génération de femmes vive plus libre et plus épanouie que la précédente.

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