Intervention de Michèle PICARD, Maire de Vénissieux, Vice-présidente de la Métropole de Lyon, à l’occasion des 80 ans du Secours Populaire Français.
Mesdames, Messieurs,
Aujourd’hui, nous célébrons bien plus qu’un anniversaire.
Nous célébrons 80 ans de solidarité et d’engagement au service des plus vulnérables. 80 ans de combat contre la pauvreté et l’exclusion. 80 ans de dignité rendue à celles et ceux qui, souvent invisibles, ont trouvé au Secours populaire, une main tendue, un regard bienveillant, un soutien inconditionnel.
L’histoire du Secours populaire français, c’est d’abord l’histoire d’un refus. Le refus de l’indignité et de l’oppression. Si nous fêtons aujourd’hui la création officielle en 1945 du Secours populaire, il faut remonter aux années 1920 pour comprendre les racines de cet engagement. C’est la création du Secours rouge international par des militants communistes, qui défend des bagnards, des militants syndicaux ou anticolonialistes, et dénoncent les injustices, le traitement des populations des colonies, l’accueil des réfugiés. Ces combats n’ont, malheureusement, pas pris une ride.
La solidarité doit être la plus large possible et le Secours rouge devient le Secours populaire de France et des colonies. Il s’engage dans la défense des combattants de Franco en Espagne, en 1937 mais est interdit par le gouvernement de Vichy dès 1939 avec le Parti communiste. Le Secours populaire bascule dans la clandestinité ; il poursuit pourtant coûte que coûte ses actions. De nombreux membres seront déportés ou fusillés. Il renaît en 1945, porté par de nombreux résistants et par le Conseil national de la Résistance, en fusionnant avec l’Association nationale des victimes du nazisme.
Cette grande histoire, elle s’est déployée aussi chez nous, à Vénissieux, qui accueillera le premier comité du Rhône. Ce n’est pas un hasard. Nous partageons cette solidarité ancrée dans nos actions, une ville populaire et ouvrière dont l’histoire a été jalonnée par toutes les formes de résistance.
Partout en France, le Secours populaire est donc au rendez-vous des urgences humaines. Quand les prix de l’alimentation explosent, quand le logement devient inaccessible, quand les familles doivent choisir entre se chauffer et se nourrir, vous êtes là. Là, aussi, pour dénoncer les injustices structurelles. Pour refuser que la pauvreté et l’exclusion ne deviennent des états de faits que nous serions sommés d’accepter. C’est également ce en quoi nous croyons, à la Ville de Vénissieux. Ensemble, nous refusons la fatalité de la misère et de l’indifférence. Nous travaillons ensemble pour une société où la main tendue ne remplace pas les droits, mais les rend possibles.
Le lien entre la Ville et le Secours populaire n’est pas seulement ancien, il est profond, vivant. Ces valeurs communes guident depuis 90 ans notre gestion municipale progressiste et mènent à des actions concrètes. Tout récemment, nous avons mis en place une mutuelle santé communale. Tout habitant ou personne travaillant à Vénissieux y est éligible. Elle propose des tarifs accessibles, permettant à chacun, et notamment ceux qui rencontrent des difficultés financières, de bénéficier d’une couverture santé à coût réduit.
Julien Lauprêtre, secrétaire général puis président du Secours populaire de 1955 jusqu’à son décès en 2019, militant communiste et ancien résistant, le rappelait :
« La solidarité ne règle pas tout, mais pour celles et ceux qui la reçoivent, elle est irremplaçable ». C’est dans cet esprit que, malgré les crises successives, Vénissieux poursuit son rôle d’amortisseur social.
Nous avons maintenu le gel des taux de la fiscalité directe locale, inchangés depuis 2016. L’enveloppe des subventions aux associations a été revalorisée en 2024, atteignant 4,9 millions d’euros, et nous l’avons reconduite en 2025. Les tarifs municipaux ont été gelés en 2024, et en 2025 nous avons fait le choix de maintenir ce gel pour les tarifs municipaux touchant le plus grand nombre de familles, à savoir l’enfance et la restauration scolaire. Nous avons aussi acté une évolution des critères du CCAS pour répondre au mieux aux besoins des habitants.
La solidarité reste notre boussole. Ces actions ne sont pas sacrifiables. Parce que les crises ne se succèdent pas, elles s’enkystent, s’agrègent les unes aux autres, rendant les difficultés encore plus aiguës pour de nombreux habitants des villes populaires. Il faut une volonté politique forte et résolue pour combattre les inégalités et venir en aide à ceux qui en ont le plus besoin.
Nous n’avons jamais failli, de la crise du Covid où les Vénissians se sont mobilisés, à l’inflation face à laquelle nous avons su adapter nos politiques municipales. C’est là aussi une forme de résistance, et nous y tenons particulièrement. Nous n’acceptons aucune compromission dans nos valeurs.
Au Secours populaire, vous répondez aussi à toutes les crises : celles en immédiate proximité, et celles à l’international. La solidarité n’a pas et n’a jamais eu de frontières. Nous devons faire de cette idée un combat de chaque jour. De la Birmanie à Gaza, en passant par l’Ukraine, le Niger, le Liban, vous êtes présents et vous maintenez notre idéal commun d’humanité. En décembre 2024 nous avons attribué au Secours populaire une subvention d’urgence pour les populations déplacées du Liban. En janvier 2025, nous avons voté une nouvelle subvention pour vous soutenir dans votre action à Mayotte, après le passage dévastateur du cyclone Chido. Votre engagement est admirable et fait vivre la solidarité universelle. Dans un monde fracturé, vous portez une vision d’unité, de paix et d’espoir.
Vous nous rappelez à tous que l’accès aux droits fondamentaux est un combat mondial. Et que nous ne devons jamais baisser la garde.
Cette solidarité chevillée au corps ne vient pas de nulle part. Elle a été portée par des hommes et des femmes, à Vénissieux comme ailleurs.
En 2019, le Secours populaire a dû surmonter la disparition de Julien Lauprêtre, que j’ai cité plus haut. Son action, dans la Résistance comme au Secours populaire tout le reste de sa vie, nous inspire et doit nous guider. Ce n’est pas le seul. Je pense à Rosette Jeannin qui nous a quitté il y a quelques années ; elle qui s’est engagée au Secours rouge à 12 ans, et a présidé le comité de Vénissieux pendant 25 ans. 25 années passées au service des autres, des plus vulnérables ; elle est une figure historique de Vénissieux et le restera.
Je souhaiterais mentionner aussi celles et ceux qui sont parmi nous. Josy Ingargiola, responsable de la section pendant 15 ans, dont l’engagement a été sans faille, et qui a passé le flambeau à Bernard Imbert. Je vous salue tous deux chaleureusement ; votre altruisme est une leçon pour nous tous.
Enfin, je pense aux milliers de bénévoles sans qui le Secours populaire ne serait pas. A tous ceux qui donnent de leur temps, sans compter, qui ne baissent pas les bras face à la précarité qui augmente sous leurs yeux. Je tiens à saluer les bénévoles du comité Vénissieux-Corbas. Ils ont réalisé en 2024 plus de 6 300 heures de bénévolat. Leur engagement fait de la solidarité une réalité de chaque jour. Grâce à eux, plus de 1600 bénéficiaires ont été accueillis, soutenus, accompagnés.
Vous le savez, nous vivons des temps particulièrement difficiles ; nos idéaux sont en danger. Les services publics comme les associations doivent être un rempart pour nos populations, alors que l’État nous impose des contraintes budgétaires drastiques. Je sais, en tout cas, que nous continuerons le combat.
Alors, en ce jour anniversaire, je tiens à vous remercier, toutes et tous. Pour votre engagement, pour votre humanité, pour votre présence indéfectible. Merci de faire vivre la fraternité, dans notre ville comme dans le monde. Au nom de la Ville de Vénissieux, je vous adresse ma reconnaissance la plus sincère pour ces 80 années de combat. Vous pouvez compter sur nous, comme nous savons que nous pouvons compter sur vous.
Je vous remercie.